A chaque fois que je prends ma voiture pour partir un peu en vacances en province, cher lecteur, il y a un moment que je trouve absolument fascinant, je dirais même plus, magique. A un endroit précis de notre beau territoire, se produit un phénomène tout à fait étonnant que je voudrais te conter.
Ces derniers jours, j'étais parti avec la Privilégiée dans nos belles régions, histoire de nous aérer un peu, de nous cultiver et surtout de réapprovisionner notre cave en vins bien choisis, directement chez le producteur, ce que nous ne manquons jamais de faire. Nous adorons que le vigneron nous fasse goûter ses différents cépages, nous raconte ses aventures de l'année et nous initie à de nouveaux plaisirs gustatifs.
Vendredi soir, nous prîmes donc l'autoroute, la n°11 pour être précis, et nous roulâmes doucement pour retrouver notre bonne vieille ville bourgeoise du 9-3.
Depuis que Sarkozy a fait ses sorties sur la sécurité routière en 2003, nous avons connu une transformation radicale des comportements des automobilistes. Autrefois (souviens-toi, cher lecteur), on pouvait clairement différencier plusieurs types de couloirs. Sur la voie de droite, roulaient les conducteurs respectant la sacro-sainte limitation de 130 km/heure. Sur la voie du milieu se plaçaient les personnes un peu moins prudentes, mais qui n'allaient que rarement au-dessus des 160 km/h. Enfin, sur la voie de gauche, les as du volant fonçaient à 180 km/h. Si jamais nous avions le malheur d'être sur une autoroute à deux voies, les deux dernières catégories se livraient une guerre féroce sur la voie de gauche, à coup de klaxon et d'appel de phare. Ces comportements ne sont pas si vieux : c'était dans les années 1990.
Et puis, Sarkozy passa par là et réussît la seule grande transformation de ses multiples mandats. En 2002-2003, il lança une grande campagne de sécurité routière, généralisa les radars automatiques et multiplia les contrôles routiers comme des petits pains ! L'effet fut brutal. En quelques mois, les comportements changèrent complètement.
Hier soir, sur l'A11, nous avons roulé durant trois bonnes heures, en étant sans cesse avec les mêmes automobilistes. Nous nous sommes doublés, doublés et redoublés, tout cela dans un calme assez olympien. Plus de coups de klaxon, plus d'appels de phare, plus de queues de poisson... Les routes françaises ressemblent maintenant à de longs fleuves tranquilles.
On aurait pu imaginer que seule la pleine lune pouvait réellement faire évoluer les choses, mais il y a une exception. Un lieu magique, totalement irréel, que tous les automobilistes franciliens connaissent bien. Il s'agit de la barrière de péage de Saint-Arnoult-en-Yvelines.
A peine les conducteurs ont-ils passé ce lieu qu'ils deviennent totalement fous ! En quelques mètres, nous voilà revenu en 1995, lorsque je pris la voiture de mes parents pour la première fois. On se double, on se colle, on se serre, on se fait des appels de phare, on se bouscule, on s'insulte. Ces comportements se retrouvent dans tous les coins de la région parisienne.
Très étrangement, lorsqu'on arrive à Saint-Arnoult dans l'autre sens, l'effet s'inverse. Des dingues du volant deviennent subitement de doux agneaux, roulant très tranquillement vers leur lointaine région natale...
A quoi peut donc être dû une telle transformation ? Y a-t-il sous Saint-Arnoult une poche magnétique ? Est-ce un lieu sous lequel se trouve un cimetière mérovingien profané ? Y a-t-il une phrase vaudou à citer pour contrer le sort ?
Des amis attentifs m'ont affirmé qu'on pouvait retrouver des phénomènes équivalents à d'autres endroits. On cite, sous le manteau, les noms de Fleury-en-Bière, de Coutevroult, de Buchelay, des Eprunes ou encore de Chamant.
Si quelqu'un sait d'où vient cette transformation, cet effet loup-garou sur les automobilistes, merci de me laisser une indication sous ce billet.