Dans le raisonnement du camarade, on retrouve l'habituelle antienne, appliquée ici à l'extrême-gauche, sur le fait que la gauche française passe son temps à s'opposer bêtement à la droite au pouvoir. Authueil étant trop fin pour cela, il n'emploie pas les termes d'« anti-sarkozysme primaire », mais je sais que cette notion traîne souvent dans la blogosphère de droite et dans les médias de la même droite (voir les articles réguliers du Figaro). A chaque fois, j'admets que je suis très troublé devant cette accusation. Je me souviens que, sous la présidence de François Mitterrand, les militants de droite menaient de très violentes attaques contre la personne du président, pourtant moins impopulaire que l'actuel. A l'époque, on n'employa pas le terme d'« anti-mitterrandisme primaire ». On ne peut pas, lorsqu'on est dans l'opposition, ignorer la personne du chef de l'État. Nicolas Sarkozy doit être critiqué, autant sur sa personne (qu'il met suffisamment en avant par ailleurs) que sur ses actes et ses idées politiques. L'anti-sarkozysme n'est bien qu'un argument rhétorique visant à discréditer les opposants.
Dans ce même billet, Authueil tente de trouver quelques axes pouvant permettre de définir un programme de gauche renouvelé. Je te livre ici le passage :
Etre de Gauche aujourd'hui, c'est quoi ? Il y a au moins un fondement qui n'est guère contestable, c'est le refus d'une société dirigée uniquement par l'économique, où on vit pour travailler au lieu de travailler (éventuellement) pour vivre. C'est le refus du travailler plus pour gagner plus, parce que gagner plus, c'est pas forcement ce qu'on demande car on recherche davantage le "mieux" que le "plus". C'est le refus de cette société de consommation où le citoyen de base est pris pour un con plus souvent qu'à son tour, que ce soit comme électeur, comme consommateur ou comme salarié. Je pense que tous ceux qui se revendiquent de gauche peuvent signer ça.
Bizarrement, l'auteur définit tous les fondements de sa gauche renouvelée en commençant par le mot « refus ». Alors que la droite reproche à la gauche d'être sans arrêt dans l'opposition primaire, voilà qu'un blogueur de droite prend toute la pensée de gauche par le négatif.
Rien d'étonnant cependant. Étant baigné dans la culture politique de gauche, je n'aurais pas fait autrement si j'essayais de refonder la droite. Pourquoi ? Tout simplement parce que l'adversaire politique est naturellement défini par des termes plutôt négatifs, vu qu'on le différencie de soi. Comme le moi est positif, l'autre est négatif. S'il ne l'était pas, il n'y aurait pas de raison de s'opposer à lui et de vouloir gouverner à sa place.
Etant de gauche, je vais aider Samuel. Je ne crois pas que la gauche naît dans le refus mais dans la volonté de progrès et dans l'amélioration des conditions de vie de l'ensemble de la population. Aussi, si je reformulais le paragraphe précédent, je dirais :
Être de Gauche aujourd'hui, c'est quoi ? Il y a au moins un fondement qui n'est guère contestable, c'est la volonté de développer une société où l'économique vise au progrès collectif. C'est une société où l'on travaille parce qu'on veut une vie agréable et paisible, et où le gain financier n'est pas la priorité de tous, surtout au prix d'une vie médiocre. C'est le rêve d'une société démocratique dans laquelle le citoyen reprendrait en main le jeu politique, et dans laquelle le consommateur passerait au second plan. Je pense que tous ceux qui se revendiquent de gauche peuvent signer ça.
Bon, évidemment, il reste du refus, mais je ne vois pas comment faire autrement. Dans un texte de droite, on en trouverait aussi, histoire de clarifier l'offre politique.
Tiens, d'ailleurs, c'est bizarre : Authueil définit la gauche comme souhaitant un monde non dominé par l'économie. C'est pourtant par l'économie que Marx espérait transformer le monde, mais je ne sais pas à quelle gauche le co-organisateur de la RDB s'adresse effectivement…
Dès que l'on critique Sarkozy, on est un anti-sarkozyste primaire, les pro Sarkozy doivent comprendre, comme tu l'as expliqué dans ton billet que le personnage de Sarkozy, se mettant constamment en avant, se substituant par moment au premier ministre, est une cible auto-proclamée de critique diverses, surtout qu'il a commis bon nombre d'erreurs de fonds et surtout de forme.
RépondreSupprimerMaintenant quand à l'image de la gauche, elle ne m'étonne pas car la gauche ne se montre pas capable, en ces temps de crise économique de rejet important de la politique sarkozyste, de monter un projet dans lequel les gens n'étant pas de droite puissent se reconnaitre.
A mon avis, la gauche (le PS) d'aujourd'hui ne mérite pas d'autre appellation.
@ Manuel : de quelle appellation parles-tu ?
RépondreSupprimerIl faut distinguer les partis de la pensée de gauche. La pensée à gauche est bien vivante et dynamique depuis les années 1990, ATTAC et le Monde diplomatique ayant permis de rassembler les forces de tous les penseurs de gauche désemparés par le règne du fric des années Mitterrand.
RépondreSupprimerIntellectuellement, la gauche est vigoureuse, mais ses idées n'ont pas trouvé de vecteur dans le champ politique.
Plutôt que de crise de la gauche, on devrait parler de la crise d'un parti, le PS, où cohabitent désormais des militants sincères et des carriéristes pour qui le programme importe peu tant qu'on a le siège convoité.
Cher ami, pour une fois qu'une démarche originale, avec un point de vue peu courant est proposé, vous pourriez vous montrer heureux et positif, au lieu de faire de l'anti- :)
RépondreSupprimerCe n'est qu'un premier billet qui en appelle d'autres, sous lesquels vous pourrez commenter avec vos gueules de militants de gauche.
@ Etiam : tu as bien résumé les choses. Le problème est que les carriéristes doivent comprendre qu'ils feront carrière avec un programme de gauche.
RépondreSupprimer@ Authueil : mais je suis très positif, camarade. D'ailleurs, n'oublie pas la réunion de section ce soir. Pense à prendre un cubi et un sauciflard pour l'apéro au passage.