Le conflit israélo-palestinien est un sujet pourri. D'abord parce que la plupart des personnes s'y intéressant sont très engagés idéologiquement et ensuite parce qu'il est extrêmement passionnel. Il n'y a qu'à lire la multitude de billets sans intérêt, agressifs voire insultants (et je passe sur les papiers racistes et/ou antisémites qui ont dû fleurir un peu partout) qui sont parus sur la blogosphère depuis trois jours. Nos camarades ont ainsi continué à considérer que les relations internationales sont gérées par des bisounours, qu'on ne peut s'intéresser à un conflit sans s'intéresser à son histoire, qu'il faudrait éviter d'y plaquer les questions françaises du moment (comme en profiter pour taper sur les Arabes et/ou sur les juifs par exemple)...
Ce qui me fait réagir ce matin, c'est un nouveau billet de Manuel qui se questionne sur l'identité israélienne et son ancrage en tant que nation.
Le billet est intéressant et je t'en suggère la lecture, car il est important de comprendre la problématique de la religion juive pour saisir les actions d'Israël. Cependant, bien modestement, je voudrais apporter deux compléments.
Tout d'abord, Manuel explique qu'on ne peut comprendre Israël sans saisir le fait qu'il s'agit d'un melting-pot qui ne survit que grâce au judaïsme. Là, je suis entièrement d'accord avec lui, et on ne peut que s'étonner que ce pays tienne le coup avec des communautés si différentes. Peut-être Manuel oublie de rappeler que l'histoire, qu'elle soit réelle ou reconstruite, reste un ciment très fort dans la culture juive. J'ai toujours été très impressionné de la force des liens historiques unissant l'ensemble des juifs du monde. Certes, les juifs égyptiens ou yéménites n'ont pas connu les souffrances des juifs européens, mais je suis sur qu'ils les ont intégrés complètement dans leurs mémoires propres. Ce sentiment d'appartenir à un groupe uni de par l'espace et le temps forme sans doute un ciment qui peut surmonter les tensions culturelles et communautaires. Cependant, cela ne doit pas être facile tous les jours et je n'aimerais pas être un politicien israélien, devant jongler entre les différents peuples présents sur place, sans oublier les Arabes israéliens.
D'autre part, Manuel s'agace des réactions des Français face à la présence de la religion dans l'espace politique israélien. Je crois qu'il néglige un fondement de la culture politique française : sa relation compliquée avec la religion. La France, depuis 1789, n'a cessé de souffrir de ses liens avec l'Église et de la sortie progressive de celle-ci du champ politique. Alors que les Français ont eu tellement de mal à renvoyer la religion dans la sphère privée, sans doute ont-ils des difficultés à saisir qu'un autre peuple puisse créer un Etat en s'appuyant justement sur une religion. Il faut y ajouter la relation complexe de la France avec la population juive locale, sur laquelle je ne m'étendrai pas mais qu'il faut avoir à l'esprit.
Cette volonté permanente de la France de promouvoir un modèle universel agace profondément les étrangers, et j'en suis sûr, les Israéliens qui doivent se sentir jugés. Pour sortir de ce dilemme, il faut simplement se contenter d'une analyse rationnel des faits. Sinon, on tombe dans le simplisme et on en arrive à dire n'importe quoi.
Evidemment, ce n'est pas facile. J'en ai d'autant plus conscience que je passe mes journées à écrire des billets sur l'éducation, sujet qui me passionne et que j'aime, mais sans un effort de relativisation, on ne résoud pas un conflit et on arrive jamais à ce qui permet de faire la paix : le compromis.
Or, sur le cas du Proche-Orient, tellement d'abrutis tirent profit de ce conflit que les démocrates ne devraient pas tomber dans la démagogie. Délier ce noeud ne se fera pas sans que chaque camp fasse des sacrifices, quelles que soient les responsabilités de chacun. Les Israéliens ne pourront qu'abandonner les territoires occupés, que renoncer à la colonisation et qu'abandonner l'idée d'unifier Jérusalem. Les Palestiniens ne pourront pas revenir en Israël, ne pourront pas voir ce pays disparaître (heureusement !) et devront renoncer à unifier Jérusalem. Pour les deux camps, ce sera terrible, car renoncer à ses utopies n'est jamais facile, mais malheureusement indispensable.
Manuel n'y croit pas et pense qu'il ne verra pas la fin de ce conflit de son vivant. Pourtant, il ne faut pas désespérer. L'opération de la flottille vient encore de démontrer que la force est l'arme du faible. Espérons que les démocrates des deux camps parviendront à rebondir sur cet échec et que les deux peuples, lassés des morts et des bombes, finiront par imposer à leurs dirigeants d'en finir une bonne fois pour toute. Malheureusement, ce n'est pas sur la communauté internationale qu'il faudra compter pour arriver à quelque chose. J'avais beaucoup d'espoir en Barack Obama, et je ne peux qu'être déçu sur ce point...
Ce qui me fait réagir ce matin, c'est un nouveau billet de Manuel qui se questionne sur l'identité israélienne et son ancrage en tant que nation.
Le billet est intéressant et je t'en suggère la lecture, car il est important de comprendre la problématique de la religion juive pour saisir les actions d'Israël. Cependant, bien modestement, je voudrais apporter deux compléments.
Tout d'abord, Manuel explique qu'on ne peut comprendre Israël sans saisir le fait qu'il s'agit d'un melting-pot qui ne survit que grâce au judaïsme. Là, je suis entièrement d'accord avec lui, et on ne peut que s'étonner que ce pays tienne le coup avec des communautés si différentes. Peut-être Manuel oublie de rappeler que l'histoire, qu'elle soit réelle ou reconstruite, reste un ciment très fort dans la culture juive. J'ai toujours été très impressionné de la force des liens historiques unissant l'ensemble des juifs du monde. Certes, les juifs égyptiens ou yéménites n'ont pas connu les souffrances des juifs européens, mais je suis sur qu'ils les ont intégrés complètement dans leurs mémoires propres. Ce sentiment d'appartenir à un groupe uni de par l'espace et le temps forme sans doute un ciment qui peut surmonter les tensions culturelles et communautaires. Cependant, cela ne doit pas être facile tous les jours et je n'aimerais pas être un politicien israélien, devant jongler entre les différents peuples présents sur place, sans oublier les Arabes israéliens.
D'autre part, Manuel s'agace des réactions des Français face à la présence de la religion dans l'espace politique israélien. Je crois qu'il néglige un fondement de la culture politique française : sa relation compliquée avec la religion. La France, depuis 1789, n'a cessé de souffrir de ses liens avec l'Église et de la sortie progressive de celle-ci du champ politique. Alors que les Français ont eu tellement de mal à renvoyer la religion dans la sphère privée, sans doute ont-ils des difficultés à saisir qu'un autre peuple puisse créer un Etat en s'appuyant justement sur une religion. Il faut y ajouter la relation complexe de la France avec la population juive locale, sur laquelle je ne m'étendrai pas mais qu'il faut avoir à l'esprit.
Cette volonté permanente de la France de promouvoir un modèle universel agace profondément les étrangers, et j'en suis sûr, les Israéliens qui doivent se sentir jugés. Pour sortir de ce dilemme, il faut simplement se contenter d'une analyse rationnel des faits. Sinon, on tombe dans le simplisme et on en arrive à dire n'importe quoi.
Evidemment, ce n'est pas facile. J'en ai d'autant plus conscience que je passe mes journées à écrire des billets sur l'éducation, sujet qui me passionne et que j'aime, mais sans un effort de relativisation, on ne résoud pas un conflit et on arrive jamais à ce qui permet de faire la paix : le compromis.
Or, sur le cas du Proche-Orient, tellement d'abrutis tirent profit de ce conflit que les démocrates ne devraient pas tomber dans la démagogie. Délier ce noeud ne se fera pas sans que chaque camp fasse des sacrifices, quelles que soient les responsabilités de chacun. Les Israéliens ne pourront qu'abandonner les territoires occupés, que renoncer à la colonisation et qu'abandonner l'idée d'unifier Jérusalem. Les Palestiniens ne pourront pas revenir en Israël, ne pourront pas voir ce pays disparaître (heureusement !) et devront renoncer à unifier Jérusalem. Pour les deux camps, ce sera terrible, car renoncer à ses utopies n'est jamais facile, mais malheureusement indispensable.
Manuel n'y croit pas et pense qu'il ne verra pas la fin de ce conflit de son vivant. Pourtant, il ne faut pas désespérer. L'opération de la flottille vient encore de démontrer que la force est l'arme du faible. Espérons que les démocrates des deux camps parviendront à rebondir sur cet échec et que les deux peuples, lassés des morts et des bombes, finiront par imposer à leurs dirigeants d'en finir une bonne fois pour toute. Malheureusement, ce n'est pas sur la communauté internationale qu'il faudra compter pour arriver à quelque chose. J'avais beaucoup d'espoir en Barack Obama, et je ne peux qu'être déçu sur ce point...
Je ne néglige pas la relation compliquée entre les français et l'Église, mais j'aimerais simplement que le si malin français arrête de vouloir imposer son modèle aux autres. Il existe d'autres formes de démocraties que la notre laïque.
RépondreSupprimerJamais Israël ne négociera avec le Hamas, ni avec le Hezbollah. Pas ouvertement en tout cas, tu ne peux pas faire confiance à celui qui te hait, et la négociation implique une part de confiance.
@ Manuel : un Français qui n'essaierait pas d'imposer son modèle aux autres ne serait plus français, camarade...
RépondreSupprimerJe n'ai jamais dit qu'il fallait négocier avec le Hamas et le Hezbollah. Dans mon billet, je parle des démocrates.
Négocier avec Abbas et laisser pourrir Gaza, c'est possible je suppose.
RépondreSupprimerTu dis en gros que les français ont un problème avec Israël à cause de la laïcité. Je suis 0% d'accord avec cet argument. Pourquoi Israël ? Il y a des dizaines d'États religieux. La bande de Gaza, par exemple, est dirigée par les religieux.
RépondreSupprimerC'est une des raisons, pas la principale.
RépondreSupprimerLa différence avec d'autres pays, c'est qu'Israël est une véritable démocratie.
@ Manuel : oui, mais cela ne réglera pas le problème à long terme.
RépondreSupprimer@ Paul : Gaza est dirigée par des fascistes. Je doute que les Français aient de la sympathie pour le Hamas.
Non mais ça évitera à Israël de se retrouver avec un Hamas armé jusqu'aux dents à 150km de Tel-Aviv.
RépondreSupprimer@ Manuel : certes.
RépondreSupprimer@ Mathieu : il y a des français qui défilent dans la rue pour soutenir le Hamas. Je n'ai vu personne faire la même chose pour Israël...
RépondreSupprimerJustement, hier j'ai regardé la vidéo où Elisabeth Lévy rencontre Dieudonné. Ce serait intéressant d'en faire une analyse détaillée mais si je l'évoque ici, c'est parce qu'à un moment de la "discussion", Dieudonné s'insurge de la présence du président de la République au dîner du CRIF. Etre juif, c'est une religion selon lui, ce à quoi E. Lévy répond que cela va bien au-delà, qu'on peut-être juif et athée. Dieudonné lui renvoie la balle en lui demandant si il y a des musulmans athées, des bouddhistes athées et finit par un jeu de mot sur les tasses à thé, ce qui donne le ton de la conversation. C'est bien cette prétention à l'universalisme issue de la Révolution française qui transparaissait là. Finalement, les deux interlocuteurs s'y référaient. Alors même qu'Elisabeth Lévy se lamentait, invoquait Hannah Arendt et l'idée que pour se parler, il faut avoir un minimum de valeurs en commun, c'est bien ce paradoxe français qui resurgissait.
RépondreSupprimerJ'ai déjà des rassemblement pro-israéliens sur Paris, mais peut-on comparer le soutien à un état et le soutien à une organisation terroriste?
RépondreSupprimerSoutenir le Hamas et soutenir la cause palestinienne sont deux choses bien différentes.
Mtislav, t'as bien du courage à te taper du Dieudonné...
N'est-ce pas... Ce dont j'étais curieux, c'était plutôt d'elle.
RépondreSupprimer@ Paul : si, il y a déjà eu des manifestations de soutien. J'en ai souvenir.
RépondreSupprimer@ Mtislav : ah non, Dieudonné, je peux pas.
@ Manuel : en général, ces manifs sont pour les Palestiniens, et des pro-Hamas se glissent dedans.
Beaucoup de pro-Hamas, par ailleurs, sans parler de Hamas, quand on hurle "mort à Israël", c'est déjà inacceptable.
RépondreSupprimer@ Manuel : soit.
RépondreSupprimer@ Mathieu: je suis assez d'accord avec vous sur ce post, qui me semble très bien vu. Je vis à Jérusalem, et je ne suis pas sure de voir la paix de mon vivant, mais je garde aussi à l'esprit que les avancées les plus importantes se sont faites sur des périodes très courtes (78-79 à Sharm El Sheik, 91-94 avec Oslo/White Plantation/Madrid...).
RépondreSupprimerPour ce qui est de la flottile par contre je diverge complètement, il me semble que c'est loin d'être un symbole d'espoir pour la paix. Elle renforce complètement la fracture avec la Turquie, rapproche encore un peu plus la Turquie de la Syrie et de l'Iran! L'europe et Obama n'ont fait que de la diplomatie d'écolier dans la région, le résultat risque d'être redoutable...
Je n'avais pas pensé au faiot que les avancées les plus importantes vers la Paix se sont faites sur des périodes courtes et surtout après des périodes très agitées. L'espoir est donc permis...
RépondreSupprimer@ Perle : je ne vois pas où j'ai écris que cette flottille était un espoir pour la paix.
RépondreSupprimer@ Manuel : l'espoir est toujours permis.