mardi 22 septembre 2009

Le silence de la gauche sur la privatisation de la Poste.

Après une lecture de la presse du jour, force est de constater que la grève d'aujourd'hui à la Poste n'a pas été une réussite. Les postiers n'ont donc pas été suffisamment mobilisés, sans doute résignés devant le rouleau compresseur libéral et ce malgré la crise économique que ce système a provoqué et provoque. Bizarrement, le Japon vient d'annoncer qu'il interrompt la privatisation de sa poste, et le Danemark vient de renationaliser la sienne complètement et de la fusionner avec la poste suédoise, détenue à 100% par le gouvernement suédois. En France, comme sur d'autres sujets, nos élites maintiennent le cap et avancent vers la privatisation.

Certes, on a bien entendu Olivier Besancenot se plaindre de cette évolution. Quid des autres mouvements ? Le PS apporte son soutien au mouvement, de même que l'ensemble des mouvements de gauche, et tout semble tourner maintenant autour de la votation du 3 octobre.

Cependant, je ne suis pas rassuré. La blogosphère est d'habitude très accrochée à l'actualité immédiate, et peut facilement s'enflammer sur des sujets polémiques. Or, sur la Poste, les blogueurs gauchistes restent étonnement muets. Aujourd'hui, seuls Nicolas et Plume de Presse, parmi la cinquantaine de blogs que je suis, ont publié un billet. Il n'y avait que le Coucou qui semblait mobilisé sur la question.

Deux idées sont à mettre en avant :

  • Comme les autres services publics, la Poste a été construite avec les deniers publics. Depuis 20 ans, elle a subi les réformes et la réduction des financements, puis la menace du passage à la concurrence. Progressivement, le service se dégrade. Maintenant qu'on a réduit la qualité de l'ensemble, on annonce un salvateur passage au privé. Comme dans les cas précédents (et les cas futurs), nous devons affirmer que rien ne démontre que le privé gère mieux que le public, à moyen équivalent, que nous sommes face à une idéologie de droite et que nous considérons que la collectivité est l'un des meilleurs moyens de redistribuer la richesse et de susciter l'amélioration du niveau de vie.
  • Pour conforter ces demandes, nous devons réclamer que la permanente demande d'ouverture à la concurrence soit battue en brèche. La concurrence n'apporte rien d'autres qu'une prise en main des produits des services publics par des intérêts privés, sans gain pour les citoyens. Un service public ne peut fonctionner correctement qu'en situation de monopole.

Franchement, les blogueurs de gauche, au lieu de vous passionner pour les conneries du PS ou le site de Ségolène, j'aimerais bien que vous vous intéressiez aux vrais sujets, et en particulier à la politique du gouvernement, et que vous vous positionniez.

Il en est de même pour les politiques de gauche. On sait que vous avez été les promoteurs, vous aussi, des idées libérales, mais il serait temps de réagir et de revenir à vos fondamentaux.

Sinon, vous allez encore vous prendre une claque en 2012. S'il faut forcément élire des gens de droite, autant ne pas se déplacer voter…

24 commentaires:

  1. On est d'accord ! A part quelques pingouins, les blogueurs "emblématiques" de gauche ne se sont pas saisis du sujet et parlent de conneries sans intérêt.

    RépondreSupprimer
  2. Si la Poste va vers la privatisation, ce n'est pas à cause du gouvernement qui n'a rien de libéral, mais à cause de l'Europe. Et celle-ci n'a pas pour ambition de détruire les services publics français, l'ouverture à la concurrence des services postaux relève d'une autre logique.
    La construction d'un marché unique exige que les entreprises européennes soient sur un plan d'égalité dans un même domaine. Et les Etats sont très rétifs à cela, il aiment protéger leur économie nationale.
    Le fameux arrêt "Cassis de Dijon" par exemple a puni l'Allemagne car elle avait interdit sur son sol la vente d'un certain type de liqueurs, qui n'était fabriqué qu'en France et faisait concurrence aux alcools allemands.
    Pour la distribution du courrier, c'est pareil. En France, la distribution des lettres est un monopole d'Etat, mais pas partout en Europe. Du coup, si un distributeur de courrier d'un autre pays veut proposer ses services aux français, il est barré par l'Etat français.
    C'est pourquoi les institutions européennes ont imposé l'ouverture à la concurrence des services postaux. Entre parenthèses, je ne comprend pas bien pourquoi la distribution du courrier devrait faire l'objet d'un monopole d'Etat : il y a des besoin beaucoup plus vitaux que la réception et l'envoi de lettres.

    Sinon je suis d'accord avec toi sur un point pour refuser la privatisation de la Poste. Les équipements de la Poste ont été construit à grands frais grâce aux sous du contribuable français, je ne vois pas pourquoi des entrepreneurs privés devraient gagner des sous dessus. C'est donner à des richards les impôts de tout le monde. Remarque ça s'est déjà fait pour d'autres entreprises de réseau, privatisations en partie effectuées par la gauche d'ailleurs, mais bon, en politique, on est pas à un paradoxe près.

    RépondreSupprimer
  3. @ Nicolas : ils ont encore le temps de se réveiller.

    @ Paul : je te signale que l'Europe prend des décisions en collaboration totale avec les États-membres, qui ne peuvent pas se cacher derrière cela. C'était d'autant plus vrai à l'époque.

    Le fait est qu'on a choisi de s'appuyer sur les modèles concurrentiels pour les étendre, plutôt que sur les modèles monopolistiques. Là, on a été poussé par les idées de l'époque.

    Le courrier me semble être quelque chose de vital : la maîtrise de la communication est centrale en économie. Certes, Internet a bouleversé cela, mais la Poste reste nécessaire pour de nombreux envois.

    RépondreSupprimer
  4. Les États membres ont surtout procédé à des transferts définitifs de souveraineté et ne peuvent plus faire marche arrière.
    La logique économique du début de la construction européenne est davantage transnationale que libérale. D'ailleurs la CECA était tout sauf libérale : de la planification. Ainsi que la PAC. Le processus vise avant tout à unifier les économies européennes.

    Par contre, je ne vois pas ce qu'il y a de vital dans le courrier. Qu'est-ce qui est le plus important pour les français : la poste ou le boulanger ? la poste ou le médecin ? la poste ou la pompe à essence ?
    On dit qu'il faut que les petits vieux dans des villages isolés aient un bureau de poste près de chez eux, mais ne vaudrait-il pas mieux installer une pharmacie ou une superette ?

    RépondreSupprimer
  5. Je suis le débat sur la privatisation (le gouvernement nous promet que non) de la poste en me posant certaines questions... Je ne suis pas sur qu'il soit vraiment pertinent d'avoir une libéralisation à la sauce France Télécom par exemple, mais je ne suis vraiment pas fan d'un statu quo actuel.

    Ce qui me gène, comme tu l'écris bien Mathieu, c'est que la seule voix d'opposition médiatique, c'est celle toujours caricaturale du chroniqueur du Grand Journal Olivier Besancenot...

    Il y a peut être, sans doute même, une voie médiane. Où on peut assurer les missions de services publics (je crois que la distribution du courrier en est, la banque peut être moins) en modifiant certaines choses, sans aller dans une libéralisation démoniaque pour certains, pas forcément opportune pour moi.

    Sachant que le débat sur l'avenir de la poste ne peut pas se faire aussi, me semble t'il, sans une réflexion sur l'aménagement du territoire. Parler de l'un sans l'autre me parait être un non sens.

    Enfin, ma maman était la postière de mon village (là où il y a le Mont du Faucon). Je suis un peu attaché au bureau de poste du village, c'est vrai. Pas forcément à l'image d'Epinal d'un bureau de poste qui ferait aussi banque et vente de carte postale qui fait de la musique...

    Bon mercredi

    RépondreSupprimer
  6. @ Paul : certes, mais l'harmonisation s'est faite par le bas.

    Dire que les États ne peuvent pas faire marche arrière est un non-sens. Ce que les traités ont construit peut être défaits par d'autres traités. Le problème est que personne dans les gouvernements ne le souhaite, et que dès que le peuple surgit sur la scène politique européenne (comme en 2005), il est renvoyé dans les cordes.

    Ben, pour un petit vieux, il faudrait tout à côté. Le problème est que, en France, la pharmacie et la supérette sont des biens privés qu'on ne peut forcer à s'installer. Par contre, l'État contrôle la Poste, qui peut avoir des instructions pour mener une politique.

    RépondreSupprimer
  7. @ Faucon : la mission bancaire est pourtant importante. La Poste est parfois la seule banque qui accueille de nombreux clients, les autres établissements n'ayant pas l'obligation d'ouvrir un compte.

    Pour le reste, je suis entièrement d'accord avec toi sur l'aménagement du territoire. Dommage que cela ne ressorte pas dans le débat.

    RépondreSupprimer
  8. Ce matin, Estrosi expliquait sur Inter que cette réforme de la Poste se faisait dans un cadre légal très strict. Selon lui, la loi sur la Poste a été faite de manière a empêcher toute possibilité de faire entrer des fonds privés au capital de la Poste. Au contraire de la loi GDF.
    A l'écouter, on est rassuré, tranquillisé.
    Mais s'il appelle Besancenot et Aubry des menteurs et manipulateurs, il devrait savoir que ces 2 termes sont la base d'une carrière politique, et que lui n'en est certainement pas exempt.

    RépondreSupprimer
  9. Estrosi, c'est pas celui qui s'est fait élire sur sa promesse de se consacrer entièrement à son mandat de maire, et qui a trahi ses électeurs un an plus tard ?

    RépondreSupprimer
  10. @ Mathieu : la question est : pourquoi l'Etat contrôle-t-il la Poste et pas les pharmacies ? Pourquoi la priorité des investissements en matière de service public est-elle la distribution du courrier et pas l'alimentation, le logement, la santé ?

    RépondreSupprimer
  11. @ Manuel : Estrosi est un politicien professionnel, et il connaît les ficelles du métier.

    @ Paul : si, c'est bien lui ! Pour le reste, je pense que tout peut prêter à discussion. Après, cela dépend de l'histoire d'un pays, de ses traditions politiques et des idées qui y dominent.

    Aux Etats-Unis, par exemple, la Poste et l'eau sont publiques, de même que le système scolaire pour les pauvres. Les Américains ne remettent pas cela en cause.

    A mon sens, c'est aux citoyens de choisir ce qu'ils veulent privatiser et ce qu'ils veulent gérer en commun, en toute connaissance de cause et avec possibilité de revenir en arrière sur une décision, en fonction du contexte.

    C'est pour cela que je trouve l'idée du référendum positive, parce qu'elle permettrait à chacun de s'exprimer librement et à une position majoritaire d'émerger. Dommage qu'on ne puisse pas le faire.

    RépondreSupprimer
  12. D'accord avec ta vision des choses. Ce qui me gène dans l'affaire de la Poste, ce n'est pas que l'entreprise soit publique, c'est l'existence d'un monopole. Chacun devrait avoir le droit de distribuer du courrier et de faire payer ce service. Comment peut-on justifier décemment cette interdiction ?

    RépondreSupprimer
  13. @ Paul : parce qu'un service public ne peut fonctionner correctement en situation de concurrence, vu qu'il est attaqué par des acteurs privés qui feront tout pour le déstabiliser, vu le gain possible pour eux. Soit on a un service public monopolistique, soit du privé en libre-concurrence (en sachant qu'avec le poids des infrastructures, la libre-concurrence me semble une belle illusion idéologique).

    RépondreSupprimer
  14. Ces derniers temps, on parlait de l'intérêt des milieux de la banque pour La Poste, en cas de privatisation… Évidemment, c'est le côté banque postale qui les intéresse… Or précisément, ce secteur de la poste qui nous agace souvent, est un des plus utiles dans toutes les zones rurales, vu que tout à été fait pour que nous ne puissions plus nous passer de compte bancaire. Les vieilles gens qui ne peuvent se déplacer ont recours à la poste. Et, n'oublions pas que les comptes postaux sont à peu près les seuls à admettre n'importe quel "client", y compris les plus pauvres. Il faudrait aussi parler d'une quantité de menus services "indispensables", mais non statutaires, qu'il serait fastidieux de décrire, rendus par les postiers en milieu rural —et ce n'est possible que dans le cadre d'un service public.

    RépondreSupprimer
  15. @ Le Coucou : bien sûr, et on ne peut se passer d'un compte bancaire, donc l'existence d'un service public est indispensable. Cependant, je reste persuadé que le courrier est vital aussi, surtout dans les zones rurales ou internet est encore peu accessible, et particulièrement la partie colis.

    RépondreSupprimer
  16. @ Mathieu : pour moi, le problème c'est que l'État dans ce cas précis fournit un service payant. Les usagers du service public deviennent des clients, et le service public devient une entreprise qu'il faut protéger de la concurrence.
    Les services publics devraient être toujours universels et gratuits, telle est ma conception.
    Tu remarqueras que les services publics régaliens font face à une concurrence (police : sécurité privée, justice : arbitrage), mais ça ne pose aucun problème, parce que ce sont de véritables services publics et non des entreprises d'État.

    RépondreSupprimer
  17. @ Paul : je ne comprends pas bien. Le paiement vise à permettre que le service ne pèse pas complètement sur tout le monde mais aussi sur les usagers. Je m'étonne que tu prennes cette position, car elle permet que l'impôt ne soit pas plus lourd.

    Cependant, je suis d'accord avec toi pour la gratuité. Je l'ai déjà souvent dit pour les transports en commun.

    RépondreSupprimer
  18. C'est drôle car quand j'ai lu le dernier commentaire de Paul, j'ai d'abord pensé qu'il était de Mathieu...

    RépondreSupprimer
  19. L'impôt n'est jamais trop lourd s'il s'avère que les services rendus par la puissance publique sont indispensables à la préservation des droits naturels de chacun (ce qui me semble douteux concernant la distribution du courrier).
    Finalement, faire peser la charge du service sur les usagers et non sur l'ensemble de la communauté, c'est admettre que le service public en question n'est pas vraiment d'intérêt général.

    RépondreSupprimer
  20. @ Paul : c'est surtout admettre que les pressions sont toujours terribles pour limiter le poids de l'impôt progressif alors que c'est un système égalitaire en l'occurence, pour faire peser la charge sur les usagers.

    Il serait parfaitement possible de démontrer que certains services bénéficient à tout le monde. Par exemple, les transports publics parisiens bénéficient à tout le pays car ils font baisser les émissions de gaz à effet de serre de l'une des régions les plus polluantes de France. Ainsi, la Champagne est moins souvent nappée par les gaz parisiens. Pourtant, un Champenois n'ira peut-être jamais à Paris...

    RépondreSupprimer
  21. Je ne suis pas du tout convaincu par ta logique, si tout ce qui limite les émissions de CO2 est d'intérêt général, érigé en service public et nationalisé, on est pas sorti de l'auberge.
    Si j'achète une voiture électrique doit-je me voir rembourser ma voiture et mes déplacements par l'État ? Le champenois n'utilise pas ma voiture, mais il en profite le bougre, car il a moins de CO2 : il doit donc payer une partie de ma voiture ?
    Le Champenois doit-il rembourser mes chaussures si je vais au boulot à pied ? Quelque part, il utilise mes chaussures car elles augmentent son bien-être !
    Cette question est traitée par les économistes qui parlent d'externalités (positives ou négatives). Il est vrai que celles-ci ne sont pas gérées par les mécanismes du marché. Mais si on décide de les faire gérer par l'État, autant installer tout de suite un régime d'économie planifiée, parce qu'il n'y a aucune limite.

    RépondreSupprimer
  22. @ Paul : c'est ce qui se passe ! Aujourd'hui, avec le bonus écologique, pris sur les impôts, le Champenois paie une partie de ta bagnole.

    Les économistes des externalités évoquent tout de même l'importance de la puissance publique dans ce cas.

    RépondreSupprimer
  23. Ouep, et c'est franchement craignos : moi qui me déplace à pied, et qui vit sous le seuil de pauvreté, je me fait taxer pour payer la Prius d'un richard (25.000 €). Quelle est la logique ? Les riches peuvent se payer une bonne conscience écologique avec l'argent des autres ? Et ceux qui ne peuvent que s'acheter une vieille voiture d'occasion, ou rien, donc transport en commun payants, ils payent plein pot...

    RépondreSupprimer
  24. @ Paul : là-dessus, d'accord. Je suis pour la gratuité des transports en commun d'ailleurs.

    RépondreSupprimer