mercredi 22 avril 2009

Les conférences sur le racisme de l’ONU ne servent à rien si les démocraties n’affrontent pas le problème.

Pour la deuxième fois, l'ONU s'est lancé dans un véritable fiasco : la conférence sur le racisme. Évidemment, comme la première fois, le président iranien a pu se laisser aller à ses habituels délires antisémites. La plupart des pays occidentaux ont boudé la conférence, et elle a abouti à un communiqué certes intéressant mais finalement très consensuel, et ce malgré les cris de victoire d'Human Rights Watch.

De nombreux journaux, télévisions et blogueurs ont dénoncé le scandale de cette conférence, je n'y reviendrai donc pas. Par contre, deux questions me taraudent depuis le début de la semaine : est-ce bien le rôle de l'ONU de s'occuper de la question du racisme ? Si oui, que peut-on en attendre d'une conférence sur la question ?

La première question, a priori, amènerait à une réponse négative, mais c'est sans compter le risque que représente un État appliquant des théories racistes. A l'origine, le rôle de l'ONU était de préserver la paix entre les pays et de mettre un terme aux différents facteurs de conflits, comme la colonisation par exemple, mais aussi de structurer un peu le droit international. Progressivement, et malgré les grandes difficultés de l'ONU à agir dans quelque domaine que ce soit du fait du contexte de la Guerre Froide, l'organisation a régulièrement accru ses missions, en étendant ses préoccupations au développement (création de la CNUCED en 1964) aux problèmes environnementaux (Rio en 1992), ou à d'autres questions comme l'eau en 1997. En soi, on pourrait penser que l'ONU est hors-sujet, mais ces problèmes pourraient devenir, un jour ou l'autre, des facteurs de guerre. Or, le racisme a été un facteur très important de conflits. N'oublions pas, cher lecteur, que la seconde guerre mondiale a été causée en grande partie par cette logique. De même, le génocide rwandais et les guerres de Yougoslavie ont pour origine des idéologies racistes. A l'évidence, cette question concerne donc les instances internationales.

Maintenant, ces grandes messes entre États servent-elles à quelque chose ? En réalité, je ne le crois pas. Bien sûr, l'ONU se doit de condamner le racisme (elle le fait d'ailleurs dans sa charte) et d'intervenir contre tout État qui mène des attaques liées à des idéologies racistes. Cependant, peut-elle inciter les pays à lutter contre le racisme chez eux ? Peut-elle seulement avoir un impact sur les États en eux-mêmes ? Je n'en crois rien. Les peuples se fichent totalement de ce que dit l'ONU. Le président iranien a fait son discours pour flatter une partie de la population du Moyen-Orient et ses propres électeurs. Cela ne risque cependant pas de lui éviter de perdre les prochaines élections chez lui, du fait de la situation économique du pays et des évolutions de la société iranienne. A mon sens, ces conférences ne servent à rien car elles n'impactent pas le problème en lui-même.

La charte de l'ONU se suffit donc à elle-même, et il serait bon que nos pays l'appliquent réellement, et pas seulement quand cela les arrange. Récemment, la Russie a mené une guerre raciste en Tchétchénie. Qu'en est-il ? Le Soudan extermine la population du Darfour. Qu'en est-il ? La Turquie réprime les Kurdes. Qu'en est-il ? La Chine écrase le Tibet. Qu'en est-il ? Condamner l'Iran, c'est bien joli, mais quand des pays font du racisme et qu'on ne fait rien, à quoi cela peut-il bien servir ?

La lutte contre le racisme se fait d'abord par des actes. Les gesticulations des conférences n'apportent rien à la question. Il serait bon qu'on en prenne conscience…

8 commentaires:

  1. C'est juste, mais les actes ne peuvent émaner que des nations souveraines elles mêmes coupables de ces crimes.
    Lorsqu'un individu commet un crime, on l'arrête, on le juge, on l'emprisonne.
    Lorsqu'une nation commet un crime, quel genre d'acte faut il poser ? Qui faut il arrêter ? Qui faut il juger ? Au nom de quel autorité ?

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  2. Il est super ton billet, Mathieu!
    Le racisme doit être combattu à sa racine, tant qu'on ne règlera pas les causes du racisme existant dans certaines parties du monde, il existera.
    On peut discuter, s'engager, demander aux autres de s'engager, ça ne changera rien.
    tzatza, quand une nation ne respecte pas les lois internationales, on doit appliquer des sanctions qui sont prévues dans les textes.

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  3. @ Tzatza : il existe la Cour Pénale Internationale, fait pour juger les dirigeants criminels. Ce n'est pas encore très efficace, mais c'est déjà un pas. Maintenant, il faut des interventions de l'ONU. Ce serait l'idéal.

    @ Manuel : entièrement d'accord.

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  4. Moi aussi je suis d'accord avec ça. Mais si cette conférence est évidemment une mascarade, c'est parce que la commissions des droits l'homme a été noyautée par des États pas très démocratiques...

    PS : c'est normal que ce soit le même lien sous "cris de victoire" et "blogueurs" ?

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  5. « Le racisme doit être combattu à sa racine, tant qu'on ne règlera pas les causes du racisme existant dans certaines parties du monde, il existera. »

    Comme vous êtes drôles, parfois ! Et vous la voyez où, cette fameuse "racine" ? Et ces non moins fameuses "causes" ? Et pourquoi "dans certaines parties du monde" ? Citez-moi les autres parties,n celles qui en seraient exemptes...

    Quand donc ouvrirez-vous les yeux sur la nature humaine ? sur ses constantes ?

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  6. @ Rubin : merci pour la remarque technique. Pour la CDH, entièrement d'accord, c'est une blague.

    @ Didier : que le racisme existe partout, d'accord. Mais que des États le soutiennent ou l'appliquent, c'est autre chose. C'est contre cela qu'il faut lutter.

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  7. Franchement qu'un gars chez nous vote Le Pen et n'aime pas les arabes, je trouve ça naze, mais c'est un autre problème.
    Le racisme dont je parle, c'est celui qui provoque des génocides, des guerres, des réfugiés.
    Et ces situations sont provoqués par une décolonisation baclée et aujourd'hui par un maintien de certaines populations dans la misère.
    Je parle de l'Afrique, par exemple.
    Ensuite, pour ce qui est des chinois ou russes, tout se joue à un niveau n'ayant rien avoir avec les victimes, ce sont des jeux politico-économiques teintés de démagogie.
    T'as du fric, du pouvoir, fais ce que tu veux.

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  8. Désolé de me faire un peu de pub, mais je me suis dit que ça pourrait vous intéresser de jeter un coup d'oeil au texte de la déclaration finale : http://is.gd/ugW3

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