dimanche 8 novembre 2009

Megan Fox, victime de qui ?

Si tu es urbain, voire parisien, cher lecteur, tu as forcément vu, ces dernières semaines, cette affiche placardée dans tous les couloirs du métro. Apparemment, il s'agit d'une comédie gore qu'a réalisée Karin Kusama. La scénariste est Diablo Cody, qui était déjà à l'œuvre dans Juno, mais je vais te décevoir, cher lecteur, je n'ai pas vu Jennifer's Body et je crains que ce film ne reste pas dans les annales du cinéma. Je vais plutôt te parler de cette affiche qui connaît une carrière intéressante.

Si on l'analyse un peu, on ne peut que constater que les publicitaires ont voulu affirmer l'intérêt, indéniable par ailleurs, de la plastique de Megan Fox. L'actrice se retrouve en position suggestive (une mini-jupe très courte et des jambes en position sharon-stonienne), avec une vue directe sur son décolleté. Un filet de sang coule de ses lèvres (mais est-ce bien du sang ?), évoquant le côté gore du film, qu'on ne remarquera pas vraiment sinon, à part la main du cadavre dans le coin en bas à droite de l'affiche. Certes, l'affiche suggère un côté sexy prononcé, mais révèle surtout que, vu les efforts pour mettre en valeur Megan Fox, le scénario ne doit pas casser des briques…

Et puis, ce n'est pas la première fois que les murs de Paris se couvrent d'affiches suggestives. En fait, les publicitaires n'usent plus que de cette arme, pour nous vendre voitures, films, voyages, assurances ou pots de yaourt. Il est parfois difficile de saisir le lien entre la belle jeune femme (souvent très maigre d'ailleurs) et le produit vendu : il faut croire que les contrats d'assurance-vie provoquent, chez certains, de violentes poussées hormonales lorsqu'ils sont présentés par un mannequin de 18 ans pesant moins de 45 kg.

Or, très rapidement, Megan Fox a été attaquée, et vigoureusement. Cela a commencé par des crachats, puis des atteintes directes à l'affiche elle-même, comme des coups de canif ou de cutter, voire des déchirures. Au début, j'ai pensé, assez logiquement, à des féministes faisant démonstration de leurs convictions sur l'usage nauséabond du corps de la femme sur les murs parisiens. Et puis, finalement, non.

Les injures sont apparues et couvrent maintenant Megan Fox. Elles sont généralement de très haute volée : « bitch », « chaudasse », « salope », « cochonne », « femme impure », « pétasse », le tout ponctué de moult points d'exclamation… On peut éventuellement admettre que les féministes sont vicieuses dans leur lutte contre la domination masculine, mais on a du mal à les imaginer utiliser ce vocabulaire.

Alors, qui ? Sans doute des représentants de l'ordre moral, des coincés, des religieux divers et variés, quelques détraqués, en tout cas très souvent dysorthographiques, le « chodasse » voire le « chôdace » étant plus fréquent que le « chaudasse »…

Une question me taraude pourtant davantage : pourquoi cette affiche-là ? Je m'étais dit que la campagne Dolce & Gabbana, qui a duré plusieurs semaines, avec des mannequins d'il y a 10 ans nues, susciteraient des réactions de ce genre, et pourtant, non… Aucune insulte, aucun tag et quasiment pas de crachat, alors que les trois mannequins se trouvent nues avec des mannequins masculins.

Si, cher lecteur, tu es une de ces personnes qui a été choquée par cette affiche de film de série B, j'aimerais bien que tu m'expliques pourquoi cette campagne-là t'a davantage atteinte que les autres. J'aimerais bien comprendre, car il ne me semble pas que dans la flopée d'affiches débiles qui couvrent les murs de nos villes, Megan Fox et sa plastique n'aient été plus provocantes que bien d'autres posters du même genre…

12 commentaires:

  1. Tu plaisantes?
    Qu'est-ce qu'elle a de spécial cette affiche?
    Sinon Juno c'était bien et j'aime bien les femmes impures, mais bon.

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  2. je n'ai pas encore vue l'affiche. tu as raison, pourquoi celle là ?

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  3. @ Manuel : ben, j'en sais rien, mais elle énerve. Moi aussi, j'aime bien les femmes impures.... Et Juno était très sympa en effet.

    @ Olympe : mystère... Je suppose donc que les féministes n'ont rien à voir avec ça.

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  4. Parce qu'elle est censée être lycéenne, et pas une femme "adulte"?

    Quant à Juno, oui, il y avait des choses drôles, mais non, ce n'était pas "bien".
    Ce film ne fait jamais que remettre en cause le droit à l'avortement, avec un traitement léger et "in" des arguments principaux des anti-avortement face à une grossesse non désirée chez une jeune fille, qui se trouvent donc banalisés voire sympatiques : l'héroïne se présente comme étant d'autant plus une qu'elle fait le "don de la vie" (n'oublions pas qu'elle décide de garder son bébé parce qu'il a des ongles) à une autre femme qui ne pouvait la donner elle-même... c'est "bien", "beau" (moral et juste, surtout).

    Ce film m'a profondément gênée, et encore, je passe très vite sur la façon dont l'impact d'une grossesse sur le rapport au corps est dédramatisé (être enceinte, c'est avoir un gros bide).

    (oui je sais, cette critique vient un peu tard).

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  5. @ Sabine : sur le sens politique de Juno, je suis d'accord, mais cela n'empêche pas que c'était un film sympa (je laisse Manuel répondre sur le "bien"). Le fait est qu'il résumait bien les positions des Américains sur cette question.

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  6. Juno m'a fait rire, et m'a même par moments touché, maintenant s'il faut voir du féminisme ou de l'anti-féminisme partout, je vous laisse vous amuser.
    Il faut dramatiser la grossesse? C'est devenu une maladie ou une tare? Et ne pas avorter, c'est devenu grave?

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  7. Pourquoi Megan Fox et pas les top model des 90's ? Peut-être parce que ces dernières sont des femmes approchant de la quarantaine, tandis que l'affiche du film reprend tous les codes de l'adolescence (la mini jupe d'écolière, la salle de classe, le tableau noir...)?
    Je m'explique : je me fais la réflexion suivante de plus en plus souvent, à mesure que je prends de l'âge en fait : la trentaine a au moins un avantage pour les femmes. En effet, les "représentants de l'ordre moral, les coincés, les religieux divers et variés..." (pour reprendre tes termes) nous foutent enfin la paix et cessent de vouloir nous remettre dans le droit chemin. Un peu comme si on étaient des causes perdues, alors qu'il est bien plus facile d'essayer d'influencer et/ou d'impressionner les plus jeunes.
    De plus, dans une société qui semble de plus en plus attirée par les extrêmes, nos adolescent(e)s se retrouvent tiraillé(e)s entre
    - d'un côté un retour en force du puritanisme (dans nos banlieues certes, mais pas exclusivement)
    - et de l'autre un mattraquage médiatique, avec des jeunes starlettes hyper-sexualisées (qui sont d'ailleurs souvent plus âgées que les personnages qu'elles interprètent à l'écran)
    Peut-être que cette déferlante d'injures traduit le malaise d'une société où le sexe est vendu par des communiquants en tout genre comme vecteur de réussite sociale, économique, politique...?
    Ou peut-être que Megan Fox est juste insupportable? Non je plaisante.

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  8. @ Anonyme : vision intéressante. Sur le côté insupportable de Megan Fox, j'admets qu'en dehors de cette affiche, je ne la connais que peu...

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  9. Voilà, je partage tout à fait l'analyse d'anonyme (y compris pour ce qui est du côté énervant de Megan Fox, avec ses quelques mots de Shakespeare tatoués sur le dos; mais il faut dire que je démarre vite au quart de tour avec Shakespeare, et puis je m'arrête là, on n'est pas sur un blog de midinettes, ici)

    @Manuel (si je puis me permettre):
    1. je ne crois pas qu'il y ait quoi que ce soit de féministocentriste à voir les questions de droit des femmes (qui ne sont jamais que des droit de l'homme) là où elles sont, tout simplement, et elles ne sauraient ne pas être là où l'on parle d'avortement
    2. la grossesse n'est bien évidemment ni une maladie ni une tare, mais elle n'a jamais rien d'anodin et ne saurait se résumer à un avant/après gros ventre: il ne s'agit pas de la dramatiser, simplement de ne pas la faire passer pour un rien
    3. je ne crois pas qu'il soit bien de présenter comme naturel et/ou positif le choix de ne pas avorter sur l'argument principal de la fameuse défense pour la vie (qui est la porte ouverte à toutes les fenêtres anti-avortement)

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  10. Sabine, bien évidemment qu'aux Etats-Unis, ils ont un problème avec l'avortement, mais quand je l'ai vu, dans mon canapé français, je n'ai à aucun instant pensé qu'il puisse être un film anti-avortement. J'ai trouvé, qu'il était joyeux, drôle, et émouvant.
    Faut arrêter de tout décortiquer et voir le mal partout.

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  11. Oh mais ce n'est sûrement pas le fait des féministes, c'est même tout le contraire ! Ce sont les phallocrates froussards qui sont menacés par Mégane Fox.
    Explications : ce film de seconde zone montre une jeune femme vampire qui aime goûter les hommes avec ses crocs et qui profite de son pouvoir de séduction pour en faire son 4 heures.
    L'insulte de sale pute (cf Orelsan) pour tenter de rabaisser la femme qui se défait de la domination masculine, c'est pourtant un poncif ?
    Il faut retourner à vos études féministes, mon cher ;o)

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  12. @ Stedransky : ah, tiens, je m'étais trompé... ;)

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