Je vais vous raconter une petite histoire qui mettra probablement notre
jeunophile bourru Fabrice en colère.
Il y a quelques années, alors que je revenais
du Japon, 8 ans après avoir quitté la France, j'ai travaillé dans un restaurant sur la Butte Montmartre à Paris, restaurant pour touristes, toujours blindé, pas cher et pas bon.
J'y ai vécu 7 moins d'enfer, 66 heures de travail par semaine, un patron tyrannique comme je n'en ai jamais vécu de ma vie, des journées entières à mes faire hurler dessus, mais entre 2500€ et 3000€ de salaire par mois, pourboire inclus.
Après 7 mois, j'étais l'un des plus anciens, mais je n'en pouvais plus, des mois à être irrascible à la maison, des mois à porter un béret pendant toute la semaine et à stresser au point d'avoir des péllicules plein les cheveux, j'ai donc arrêté, et j'ai cherché ailleurs. A mon grand plaisir, quand je suis allé voir une agence d'intérim spécialisée dans la restauration à Paris, la personne chargée de ma placer, m'a déroulé le tapis rouge quand elle a vu que j'avais survécu 7 mois dans ce restaurant. Je me suis vu proposer un poste de chef de rang avec évolution possible vers la gérance, rien que ça.
Tout ça pour dire, qu'en plus de m'avoir donné l'opportunité d'économiser un joli matelas m'ayant par la suite permis de changer de profession et de combler les nombreux trous budgétaires auquel j'ai dû faire face, cette expérience m'aurait également ouvert la voie royale si j'avais persisté dans la voie de la restauration.
Un détail important pour mieux comprendre la petite histoire qui suit, ce patron tyrannique aime les jeunes, les inexpérimentés, il le matraque, les noie pour mieux les façonner à son image.
Quand je suis arrivé à Paris, j'avais 7 ans d'expérience dans le métier, mais à l'étranger, et il est le seul à m'avoir donné ma chance quand les bistrot et restos parisiens m'envoyaient chier.
Le second point important, c'est qu'il ne vire jamais, tu peux être mauvais, il va te dégoûter, il va te punir, te faire chialer, mais il ne te vire pas, il te fait démissionner.
Donc, un jour, jour de recrutement, alors que je me tiens près de la caisse, arrive un jeune gars, la vingtaine, casquette vissée sur la tête, jogging, baskets.
Le gars s'adresse au caissier et lui dis qu'il vient pour l'annonce avec un accent clairement estampillé banlieue.
Le caissier esquisse un sourire et l'envoie au premier.
5 minutes plus tard, le gars redescend à vive allure en marmonnant je ne sais quoi dans sa barbe (il n'était pas barbu mais bon). Le patron descend m'engueule car je n'ai rien à faire devant la caisse et fustige le type qui vient d'échouer à son entretien d'embauche.
Pour ma part, je regarde partir ce gars, et je ne peux m'empêcher de penser qu'il vient de louper l'occasion de sa vie. Une occasion de gagner beaucoup d'argent, de se faire un CV et d'apprendre le travail tellement à la dure que tout lui paraîtrait simple après cette expérience.
Et pourquoi l'a-t-il ratée? Parcequ'il n'a été capable ni de mettre un jean et une chemise et ni d'adapter son language au monde du travail.
Je l'imagine en train de se plaindre de discrimination, de s'apitoyer sur son sort de victime de banlieue et toutes ces conneries qui me hérissent le poil, alors qu'il ne peut s'en prendre qu'à lui même.
Ce patron est un gros con, mais il n'est pas raciste et il donne sa chance à celui qui veut bosser et suer.
Je doute qu'il retrouve une occasion aussi facile d'entrer dans la vie active par ce type de porte en argent.
Je ne veux pas dire au travers de ce billet que tous les jeunes de milieux modestes ou issus de l'immigration sont fautifs de leurs échecs. La discrimination existe, bien sûr et c'est déplorable, mais avant se pleurer sur son sort, il faudrait apprendre à mettre toutes les chances de son côté, savoir s'habiller (Tati c'est parfait), apprendre à parler un français convenable sans ces intonations typiques de la banlieue qui vous ferment tant d'accès.
Il faut que la société française s'ouvre et accepte ces jeunes, mais il faut surtout aussi qu'eux-mêmes acceptent de jouer selon les règles du jeu en vigueur, j'ai trop souvent l'impression que certains croient pouvoir imposer leurs règles au monde, ben non.