Pour comprendre la situation, il faut comparer les deux systèmes. Les pays qui appliquent l'imposition à la source prélèvent un pourcentage du salaire chaque mois, prélèvement effectué par l'employeur. A la fin de l'année, l'administration fiscale recalcule les revenus réels et régularise ensuite la situation. Mes connaissances au Canada et aux États-Unis m'ont souvent dit que l'État avait une tendance à prélever systématiquement davantage que la somme réellement due. En France, les revenus sont déclarés plusieurs mois après la fin de l'année civile, en mai, et les impôts sont payés durant l'année N+1 selon la déclaration précédente, soit en paiement mensualisé, soit en trois fois. Dans un cas, l'État perçoit donc l'impôt durant l'année de perceptions des revenus, et dans l'autre, l'État récupère la somme durant l'année suivante, mais vu le décalage d'une année sur l'autre, le résultat est le même.
Manuel nous indique que cette réforme permettrait de ramener dans les caisses de l'État de l'argent frais en pleine période de crise. Déjà, je ne peux que me poser en faux contre cette affirmation. Si on prélève cette année l'impôt de 2008, l'État va toucher un impôt sur des sommes d'une année durant laquelle la situation économique n'était pas encore trop grave, alors que les impôts de 2009 seront forcément plus faibles. De plus, comme Nicolas le souligne, il faudrait forcément faire une année blanche, car si on prélevait en même temps l'impôt de 2008 et celui de 2009, il risquerait d'y avoir bien plus que 2,5 millions de manifestants dans les rues.
Maintenant, pour regarder les bénéfices et avantages du système, je pense qu'il n'y en a quasiment pas, surtout si on est mensualisé. Pourtant, je voudrais faire une petite remarque de fond sur cette question. Actuellement, je touche mon revenu de 2009. Je sais que je vais devoir payer des impôts l'an prochain, mais je dispose maintenant de la somme, dont je peux faire ce que je veux : soit je la stocke dans un compte-épargne qui me permet le gain d'un minuscule intérêt, soit je peux éventuellement me servir de la somme en cas de coup dur, soit je peux la dépenser bêtement et me saigner les mois suivants pour payer mon impôt. En clair, je suis responsable et je gère ma comptabilité comme je l'entends.
Avec le système à la source, le résultat est le même au final, mais par contre, durant l'année en cours, je me retrouve immédiatement privé de sommes qui m'empêche de faire tout ce que je pouvais faire avec avant. Certes, je n'ai plus à me poser de questions sur ma gestion financière, et je récupérerai plus tard la somme que j'ai vraiment gagné, mais durant l'année, l'État a bloqué mes possibilités d'épargne, quand bien même elles sont ridicules.
Bon, je ne ferai pas une maladie si on changeait de système, mais je trouve qu'on a deux systèmes (un responsable et un moins responsabilisant pour le citoyen), que le second réduit nos possibilités d'action, et que cela me suffit à le refuser. Je préfère largement qu'on me retire la somme juste plutôt que de faire des avances qui ne me seront remboursés qu'un an après. Au moins, les choses sont claires. Comme Nicolas le disait à Rubin, on peut très bien réduire le délai de déclaration et régulariser plus vite la situation, mais là, c'est vraiment de la technique…
Il reste le risque sur la progressivité que Nicolas évoquait dans les commentaires du billet précédent. Là, je pense qu'il n'y a pas de réelle connexion. Rien n'empêche d'être progressif, ou de ne pas l'être, dans les deux systèmes.
L'imposition à la source devrait rendre la collecte plus simple pour l'État, puisqu'il s'agirait d'intervenir auprès d'un nombre inférieur de personnes — majoritairement les employeurs.
RépondreSupprimerMais pour être vraiment intéressant, le prélèvement à la source doit également arranger les contribuables, en s'accompagnant, dans les deux temps de son mécanisme, d'une simplification des modes de déclaration.
Bien conçu et bien appliqué, l'impôt prélevé à la source est en réalité plus loyal que le système français actuel.
@ Rubin : soit, mais il faut que tu t'expliques. Ton commentaire manque de clarté. Je voudrais vraiment comprendre ton concept de loyauté, parce qu'en fiscalité, cela me semble obscur...
RépondreSupprimerC'est quand même plus fair-play de prélever une provision chaque mois, puis de régulariser en fin d'année, que de faire payer à N + 1 les revenus de l'année N.
RépondreSupprimerDans ma petite expérience, il m'a semblé que l'imposition à la source apporte beaucoup de visibilité quant à la détermination et au montant de l'impôt dû.
@ Rubin : ah, mais là, tu continues d'affirmer sans expliquer. Je veux du technique, Monsieur. Démontre-moi que c'est plus clair, en m'expliquant le processus.
RépondreSupprimerMathieu,
RépondreSupprimerNous sommes d'accord globalement.
"Il reste le risque sur la progressivité que Nicolas évoquait dans les commentaires du billet précédent. Là, je pense qu'il n'y a pas de réelle connexion."
Je n'ai pas dit exactement ça... Seulement que la régularisation pourrait être très importante en fin d'année s'il y a deux sources de revenus. Je pense ailleurs qu'il faudrait vérifier le niveau de progressivité dans les pays qui pratiquent le prélèvement à la source.
Rubin,
"le prélèvement à la source doit également arranger les contribuables, en s'accompagnant, dans les deux temps de son mécanisme, d'une simplification des modes de déclaration."
Depuis l'an dernier, les déclarations sont pré-remplies, il ne reste plus qu'à déclarer les 45,43€ touchés "par la banque" pour des placements divers (et consultable par internet) : ça prend 45 secondes.
"l'impôt prélevé à la source est en réalité plus loyal que le système français actuel". Bien au contraire ! Il s'agit de faire payer des sous aux gens sans qu'ils s'en rendent compte, comme la TVA. Ca n'a rien de loyal !
Mathieu,
Il oublie juste que les gens sont salariés et savent calculer leur imposition "en gros".
Mathieu, tu te places en contribuable alors que je me mets à la place de l'État. Mon but premier est de démontrer que l'État aurait à y gagner à prélever à la source en bénéficiant de l'argent plus tôt.
RépondreSupprimerPour le payeur d'impôt, cette simplification permettrait aux personnes (certainement nombreuses) pas habiles en comptabilité d'éviter de se retrouver dans une situation les obligeant à payer un mois de salaire non économisé, mais plutôt de toucher une espèce de prime d'impôt payé en trop.
D'autre part la récolte de l'impôt mensualisé pourrait être plus automatisée et nécessiterait moins de forces vives, tandis que la régularisation annuelle pourrait se faire sous la forme de déclaration mais en nombre très réduit. Finalement, la plupart des gens ne changent pas de boulot tous les ans, ni ne touchent des stocks options ...
@ Nicolas : ok, merci de la précision.
RépondreSupprimer@ Manuel : évidemment que je me place du côté du contribuable. Globalement, on sait que l'impôt sera prélevé, et que l'Etat en aura la jouissance. Que ce soit d'une année sur l'autre ou la même année ne change pas grand chose comptablement. Par contre, cela peut changer des choses pour les citoyens, et en particulier s'il y a des variations importantes de revenus. Dans ce cadre, il faut davantage réfléchir à la position du citoyen qu'à celle du fisc.
Faut reviser vos cours de finance les gars, mais le fait pour l etat d avoir les sous une annee en avance change enormement la donne.
RépondreSupprimerEnsuite, Mathieu tu parles de variations importantes de revenu rares qui devraient determiner les decisions nationales, tres logique.
Et puis le nombre de citoyens qui placent intelligemment leur fric en attendant qu il parte au fisc, trouve m en stp.
C est de la mauvaise foi.
@ Manuel : je n'ai pas compris ta réflexion sur les revenus rares.
RépondreSupprimerPersonnellement, je mets de côté ma somme d'imposition, et cela me rapporte environ 70 € d'intérêts par an. Certes, ce n'est pas grand-chose, mais c'est toujours cela de pris.
Je pense que tu es une exception, je suis persuadé que la majorité des gens ne prévoient pas aussi bien que toi.
RépondreSupprimer@ Manuel : les Français ont un rapport à l'impôt assez difficile...
RépondreSupprimerC'est pas la question, la question c'est de leur simplifier la vie, de rendre l'impôt moins douloureux en l'étalant dans le temps et en empêchant le contribuable de faire une erreur.
RépondreSupprimer@ Manuel : je te le redis, c'est de la déresponsabilisation. Je trouve que c'est dommage...
RépondreSupprimerAh oui, le français est grand, il peut se prendre en main tout seul.
RépondreSupprimer@ Manuel : apparemment, non. Tant pis pour lui.
RépondreSupprimer