mardi 31 mars 2009

L’étonnant retour d’Alain Juppé sur notre scène politique.

Les hommes politiques sont marrants. Ce matin, j'ai entendu Alain Juppé sur France Inter. L'ancien premier ministre a eu une carrière politique qui n'a pas été simple. Il a supporté l'une des grèves les plus importantes des 30 dernières années en 1995 et a été le premier ministre de la Ve République le plus impopulaire, il a dû payer pour les errements de la mairie RPR de Paris par une peine d'inéligibilité et s'exiler ensuite un an au Canada, il a enfin tenté un retour au premier plan en étant l'un des principaux ministres de François Fillon dans son premier gouvernement, avant de démissionner, à cause de son échec aux législatives.

Depuis, l'ancien Premier ministre semblait se consacrer uniquement à sa bonne ville de Bordeaux. Mais là, depuis quelques jours, Juppé fait un retour en force sur la scène médiatique : Jacques Delors l'évoque la semaine dernière comme un potentiel président de la Commission Européenne, les médias parlent aussi d'un retour au gouvernement pour redorer un peu un gouvernement Fillon dont les ministres sont pour la plupart à l'agonie politique.

Ce matin, Alain Juppé faisait la promotion de son nouveau livre : « Je ne mangerai plus de cerises en hiver. » Dans ce bouquin, Juppé prône un nouveau modèle économique moins consumériste, moins incohérent environnementalement parlant, et moins soumis aux infâmes règles du marché. D'ailleurs, ce matin, il a appelé à proposer une loi sur les rémunérations des patrons, à ma grande surprise, alors qu'on a déjà publié un décret, apparemment mal fichu, sur la question.

Franchement, cher lecteur, ce type de discours me fait bien rigoler. On oublie de dire que Juppé a été le promoteur de ce système. En tant que Premier ministre, il a défendu une politique de réduction de la place de l'Etat et de dégradation des systèmes sociaux. Auparavant, il avait été ministre du budget lorsque Jacques Chirac était Premier ministre, entre 1986 et 1988, dans une des phases les plus libérales de notre histoire politique.

Doit-on déjà à la crise d'avoir amené Alain Juppé à changer radicalement de position idéologique ? Franchement, je n'en crois rien. Sans doute s'agit-il d'une conversion bien opportune, visant à se mettre en phase avec la population pour préparer un retour.

Nos hommes politiques sont vraiment increvables…

6 commentaires:

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  2. Juste un petit avis d'un non-lecteur-régulier mais qui, tout en n'étant pas politologue, connait un peu le maire des bordelais (bordeluches comme l'on dit là bas).

    En fait je ne pense pas que cette position sur l'écologie et le changement dans la façon de concevoir la politique de M. Jupé soit un revirement soudain, du à une crise tant économique que politique.

    En effet, pour ressituer son mandat local bien plus méconnu que ses actions nationales, il a succédé à M Chaban-Delmas qui eu un règne de presque 50 ans, et lors de la succession il s'est retrouvé avec des dossiers a gérer assez lourds, une ville qui déclinait des entreprises qui fuyaient et un potentiel dans la ville gâché par un manque d'investissement.
    Il a donc Pris en main la ville et petit à petit on a vu apparaitre chez lui des élans d'écologisme (un petit néologisme à la façon de la dure du Poitou). Il a mis en place un système de vélo mis à disposition des habitants du centre bien avant les Vélibs; il a aussi veillé à ce que lors des chantiers de rénovation de bordeaux (réhabilitation des quais et création du tramway) l'aspect développement durable soit pris en compte; il se rendait même au conseil municipal à pied.
    Alors peut être que ça ne se voit pas depuis la capitale, mais l'entrée au patrimoine mondial de l'UNESCO de la ville de bordeaux, la création d'un réseau de transport à la hauteur de ce qui peut être exigible dans une des grandes villes de France sont des projets qui nécessitent un certain investissement qu'il a su apporter à cette belle ville qu'est Bordeaux.
    Certains pourront dire que je défend le maire d'une ville qu'il me plairait d'habiter, et bien je leur dit que oui, mais si je veux y vivre c'est aussi un peu à cause de ce qu'il en a fait.

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  3. @ Julien L. : ton propos n'est pas contradictoire avec ce que je disais ci-dessus. Il est dans ce cas dommage que Juppé n'ait pas appliqué à son pays ses bonnes résolutions de sa gestion bordelaise.

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  4. Faut avouer que la transformation de Bordeaux est une vraie réussite ! (et c'est là où toutes les entrées à tous les musées sont gratuites, je rappelle !).

    Quant à ses prétentions écologistes, c'est tout le paradoxe d'en avoir en ne souhaitant pas rompre avec la logique capitaliste : on cumule un peu les cautères sur une jambe de bois, bien souvent.
    (mais c'est déjà ça ?)

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  5. Moi j'aime bien Juppé... Je le préfère à une immense majorité de gens à l'UMP et au gouvernement.
    Mais bon, il avait promis qu'il se consacrerait uniquement à Bordeaux... Comme Delanoé avait promis qu'il se consacrerait uniquement à Paris pendant sa campagne municipale, avant de partir à la conquête du PS...

    Le gout du pouvoir, ça ne se soigne pas comme addiction. Mais je préfère Juppé à pleins d'autres (même si ça me fait mal au bide de voir "Juppé ministre de Sarkozy"...)

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  6. @ Audine : là est la contradiction fondamentale. Il ne m'a pas convaincu sur ce point hier.

    @ Faucon juppéiste : ce goût du pouvoir est légitime, mais il est toujours accessible aux mêmes, même les plus anciens de notre monde politique.

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